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LE MATERIALISME DES PARENTS DANS LE VALIMBABENA

Le valimbabena est une valeur culturelle profondément ancrée dans la société malgache, transmise dès l’enfance. Il incarne un sentiment de reconnaissance, de gratitude et de soutien que les enfants portent à leurs parents. Mais aujourd’hui, des phrases comme «Avec toutes ces charges, je ne peux pas m’en sortir toute seule» résonnent de plus en plus dans les foyers. Elles traduisent une attente, parfois une exigence, de retour sur l’investissement parental.

En invoquant le valimbabena, certains parents ne font plus appel à l’amour et à la gratitude de leurs enfants, mais le revendiquent comme un droit légitime. Ce qui était initialement un acte de cœur volontaire et affectif semble désormais glisser vers une obligation financière sans limite.


La tradition vers des dérives  

Ce changement du sens du valimbabena trouve ses racines dans une précarité économique persistante que Madagascar connaît depuis plusieurs années, devenue particulièrement alarmante au cours des cinq dernières. Avec un coût de la vie en constante hausse et des revenus souvent insuffisants, de nombreuses familles ont du mal à s’en sortir. Le manque de système de protection sociale comme les pensions retraite ou les assurances vie pousse certains parents à considérer leurs progénitures comme leur unique filet de sécurité. Leur « plan de retraite » s’active dès que les enfants commencent à travailler, sans même leur laisser le temps d’apprendre à épargner ou à construire leur propre avenir. Dans certains cas, les enfants sont perçus comme des comptes bancaires à débit illimité, tandis que les géniteurs se désengagent progressivement de leur rôle de subvenir aux besoins de la famille. Cette forme d’égoïsme sournois devient un véritable frein au développement personnel des jeunes générations et engendre des tensions profondes et parfois inavouables au sein des foyers.

man wiping his tears

Des conséquences lourdes et sans prix sur les enfants 

Cette pression familiale, lorsqu’elle devient permanente et non négociable, elle se transforme en véritable fardeau psychologique. Les héritiers se retrouvent victimes d’un stress permanent, d’un sentiment de culpabilité celui de croire qu’ils délaissent leur famille et d’une profonde injustice liée au fait de devoir travailler non pas pour construire leur propre avenir, mais pour ses parents. Ils développent l’impression d’être éternellement redevables, comme si leur existence devait se résumer à compenser les sacrifices passés.

Sur le plan comportemental, ce glissement du valimbabena engendre une rupture du lien affectif puisse que l’amour, la présence, l’écoute et le respect n’ont plus de place. Le geste devient mécanique, vidé de sa charge émotionnelle. L’isolement social est visible chez certains jeunes, dont la liberté se trouve entravée par les restrictions parentales concernant les priorités de la vie. Pire encore, certains enfants reproduisent ce schéma avec leur propre progéniture, perpétuant une tradition devenue contrainte.  Certaines personnes finissent par le rejeter totalement car pour elles, il ne représente plus un geste d’amour et de gratitude, mais une obligation qu’on leur impose. «On doit tout faire pour eux, autrement dit valimbabena» Voilà comment cette tradition est parfois vécue et perçue aujourd’hui.

Retour vers le vrai valimbabena

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L’amour filial n’est ni dette, ni sacrifice, ni obligation, c’est un sentiment profond que l’enfant éprouve envers ses parents, c’est une forme de reconnaissance sincère envers ceux qui l'ont porté sur le dos et élevé. Ce geste de gratitude peut s’exprimer de multiples façons, bien au-delà du soutien financier. Il peut prendre la forme d’émotions et de gestes symboliques tels que passer du temps ensemble pendant les vacances, prendre régulièrement des nouvelles par téléphone ou en personne, écouter les conseils, offrir un cadeau ou simplement respecter des aînés.

La compréhension intergénérationnelle est cruciale pour préserver ce lien filial. Savoir entendre et comprendre les attentes, les besoins et les limites de chacun, sans pression ni jugement, ne devrait jamais être un sujet tabou. Au contraire, il faut en discuter ouvertement en famille pour éviter les conflits


Le valimbabena ne doit jamais être une contrainte, mais un geste libre porté par l’amour et la reconnaissance sinon il devient une dette déguisée.  

Il évolue avec le temps, la réalité et les capacités de chacun. Ce n’est pas en imposant qu’on honore une tradition, mais en dialoguant, en comprenant, et en respectant les limites de l’autre. Un dicton Malgache dit : «Aza mitsipa-doha ny laka nitàna» - «Ne mords pas la main qui te nourrit». Ce proverbe appel au respect envers les parents, une valeur que la Bible elle-même enseigne. Mais ce respect ne doit pas être dicté par la peur ou la contrainte, il doit venir du cœur. Et, le vrai valimbabena, c’est donner librement, avec amour et non sous pression.

Voari Ravony 3 septembre 2025
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